Un nouveau départ vers un métier traditionnellement masculin

La route de Sabryna vers le programme de formation en plâtrage n’a pas été linéaire. Après un parcours scolaire pénible, elle n’a pas pu terminer son secondaire et a préféré abandonner après le secondaire 3. «J'étais une élève qui avait beaucoup de difficultés. J'avais un trouble d'inattention, j’ai redoublé à quelques reprises et je n'arrivais pas à aller plus loin dans mes études», raconte-t-elle. À 16 ans, elle commence à travailler en tant que caissière au Walmart, puis à 17 ans, elle se tourne vers la vente de bottes à cap d’acier dans un magasin industriel à Granby.
Après la naissance de ses enfants, Sabryna traverse une période sombre. «J’ai fait une dépression. Je me suis beaucoup questionné sur quoi faire de ma vie», se souvient-elle. C’est au moment où elle rencontre un conseiller en orientation qu’elle commence à envisager une carrière dans le secteur de la construction et plus précisément en plâtrage. Après une réflexion profonde, Sabryna décide de s’inscrire au DEP en Plâtrage à l’École professionnelle de Saint-Hyacinthe (ÉPSH), où elle se découvre une véritable passion pour son futur métier.
«Je ne savais même pas que je pouvais faire un métier, car je n’avais pas terminé mon secondaire. C’est là que je me suis intéressé aux métiers de la construction et, pour moi, le plâtrage semblait être une option attrayante. Je suis quelqu’un de créatif et j’ai trouvé que c’était un domaine qui me permettrait d’allier mon attirance pour le travail manuel et mon côté artistique.»
Montrer l’exemple à ses enfants

Lorsqu’elle évoque son parcours, Sabryna parle de la pression et du stress qu’elle a ressentis avant de retourner à l’école, d’autant plus qu’elle est une mère de deux enfants en bas âge. «J'avais peur de retourner à l'école, surtout après mon expérience scolaire négative», avoue-t-elle. Mais son conjoint a été un soutien indéfectible dans cette étape: «Il m'a beaucoup poussée et encouragée. Je voulais montrer à mes enfants qu'il n’est jamais trop tard pour réussir et qu'on peut toujours se relever, peu importe les échecs.»
Supportée dans son centre de formation professionnelle

L’adaptation à un environnement scolaire n’a pas été évidente pour Sabryna, surtout avec ses antécédents scolaires. Cependant, elle a rapidement trouvé une dynamique positive à l’ÉPSH. «Honnêtement, je suis surprise de voir à quel point ça se passe bien. Les enseignants sont vraiment passionnés par ce qu'ils enseignent. Ils prennent le temps de tout expliquer, même si tu n’as aucune expérience dans le domaine. Et moi, je n’y connaissais rien, mais on est parti de la base et, peu à peu, tout le monde a progressé à son rythme», explique-t-elle. Cette approche bienveillante l’a motivée à persévérer dans ses études. Aujourd’hui, elle est l’une des cinq filles de sa cohorte de 19 élèves.
Le programme de plâtrerie dure 810 heures réparties sur huit mois. C’est un parcours reconnu pour sa difficulté, autant sur le plan physique que technique. Sabryna, qui baigne dedans, parle sans détour des exigences musculaires du métier: «C’est dur au début pour les poignets, les avant-bras, les épaules et le dos, il faut vraiment apprendre à adopter les bonnes postures pour éviter les blessures» Mais ces défis physiques ne l’effraient pas. Au contraire, elle se sent épanouie dans cette voie, qui lui permet de se dépasser tout en restant créative. «J'adore travailler de mes mains, découvrir de nouvelles techniques et voir le résultat de mon travail. On apprend à faire des moulures en plâtre, des revêtements acryliques, du crépi de béton et de plâtre, et à perfectionner la finition avant la peinture.»
«Je veux montrer que je suis capable de faire le même travail qu'un homme. Même si ça peut être stressant de savoir ce que les autres pensent, je suis convaincue que je peux être aussi bonne qu’un homme dans ce métier.»
Briser le plafond… de plâtre!

Selon les statistiques de la Commission de la construction du Québec, seulement 10,2 % des plâtriers étaient des femmes en 2023, ce qui montre bien que le domaine reste dominé par les hommes. Néanmoins, Sabryna croit que la présence des femmes sur les chantiers en constante augmentation contribue à briser les stéréotypes. «Plus on verra de femmes sur les chantiers, plus il y en aura, par effet d'entraînement. Il faut montrer qu'on a notre place, malgré les préjugés.»
Au-delà de la simple volonté de prouver sa valeur, Sabryna voit son métier comme une porte ouverte sur de nombreuses possibilités. «Après avoir obtenu mon diplôme, je veux travailler sur les chantiers. À long terme, mon objectif est d’ouvrir ma propre entreprise de tirage de joints», confie-t-elle. Elle est persuadée que la demande pour des plâtriers compétents est forte et qu’il sera aisé de trouver du travail une fois son diplôme en poche.
Les aptitudes pour s’intégrer

Pour Sabryna, le plus grand défi reste la force mentale nécessaire pour évoluer dans un milieu encore largement masculin. «Pour réussir dans ce domaine, il faut avoir de la détermination, être capable d’encaisser et ne pas se laisser déstabiliser par les préjugés. Il faut être prête à se défendre et à ignorer les jugements des autres. C’est aussi une question d’humilité, de concentration et d’assiduité», affirme-t-elle. Elle sait que la route sera semée d’embûches, mais elle est prête à tout affronter pour atteindre ses objectifs.
Sabryna démontre qu’avec de la créativité et une volonté sans faille, il est possible de réussir, même lorsque les obstacles semblent insurmontables. Son message est clair: «Il n’est jamais trop tard pour commencer quelque chose de nouveau. Si tu as la passion et la persévérance, tu peux accomplir des choses incroyables.»
Avec son objectif d'ouvrir sa propre entreprise et sa conviction que les femmes ont un rôle essentiel à jouer dans le secteur de la construction, Sabryna Maher incarne l’exemple d’une génération de femmes qui brisent les barrières et redéfinissent les normes. Sa détermination et son courage sont un modèle pour les futures générations, qui pourront, grâce à des pionnières comme elle, voir un avenir sans limites.
Le métier de plâtrière, c'est quoi?

Les plâtrières et les plâtriers appliquent des enduits (plâtre, mortier, ciment, stuc, etc.) sur différents types de surfaces. Ils posent du ruban sur les joints des feuilles de gypse, réparent et sablent les surfaces, réalisent et installent des moulures et des éléments d’ornementation. C’est un métier de la construction qui exige de l’endurance et de la dextérité manuelle. Un emploi de plâtrier convient aux personnes minutieuses qui aiment le travail réalisé à la perfection.
- Secteur: Bâtiment et travaux publics
- Durée de la formation: 8 mois
- Salaire horaire moyen: 36,10$